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Le coût du Flex-office : discours et réalité

Juin 2021

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Expert - Hajar Eddial

Hajar Eddial

Hajar Eddial

Docteur en Sciences de Gestion, Post-Doc en Worplace Management à l'ESSEC & Associate Professor à l'Institut Paul Bocuse

Expert - Ingrid Nappi

Ingrid Nappi

Ingrid Nappi

Economiste, professeur HDR à l'ESSEC, titulaire des chaires Immobilier et Développement Durable et Workplace Management

En analysant les discours institutionnels, les documents internes d’entreprises dans le secteur immobilier, la presse, les stéréotypes relatifs au Flex-office dans la littérature, il s’avère qu’il y a une vision très optimiste de cet espace de travail. Le Flex-office est perçu comme étant innovant, source de partage et de bien-être collectif tout en étant économique. Notre recherche remet en question cette vision idéaliste en investiguant de près le terrain.

Déployé à grande échelle dans différentes organisations, le flex-office « espace de travail ouvert non cloisonné, non territorial (pas de poste de travail alloué par salarié), divisé en zones en fonction des activités (bureaux ouverts, salles de réunion, bulles de concentration, espace de détente) » est choisi pour différentes raisons : la principale est économique. En effet, cet espace de travail peut accueillir entre 20 et 40% d'employés de plus qu'un espace de travail ‘‘traditionnel’’ (Turner et Myerson, 1998). La deuxième raison relevée c’est que cet espace voit le jour généralement pour accompagner le changement (nouvelle organisation, déménagement, adhésion à une vision managériale différente…), et la troisième est que cet espace est une solution prise en compte pour favoriser le travail d’équipe.

La première raison a fait objet d’une recherche approfondie auprès d’experts immobiliers. L’idée était de comprendre les coûts pris en considération lors de l’implémentation du Flex-office. A travers les entretiens menés, on a noté que c’étaient principalement CAPEX et OPEX, respectivement dépenses d’investissement et d’exploitation, qui étaient considérés dans la composition du coût du flex office. Et ce n’est qu’avec davantage d’investigations qu’apparaissent les coûts cachés.

Au fur et à mesure des entretiens on se rend compte que post emménagement, il y a des coûts apparents qui n’ont pas été pris en considération lors de la décision d’implémentation de cet espace. En effet notre recherche a relevé 12 coûts cachés qui pourraient fausser le discours et l'efficacité perçue.

Ces coûts cachés classés par ordre de redondance par les différents interlocuteurs interviewés sont les suivants :

  • Absentéisme et mal-être
  • Perte de productivité et de performance
  • Perte des liens sociaux
  • Moins d’engagement, de satisfaction et d’attachement
  • Création des services supports (pour accompagner la flexibilité)
  • Mise en place de nouvelles méthodes de travail
  • Temps perdu par l’employé
  • Repenser les méthodes de management
  • Qualité du travail collectif
  • Manque de communication
  • Guerre des territoires, lutte des places
  • Coûts d’ajustements

Ces coûts cachés à la fois économiques et sociaux vont à l’encontre du discours institutionnel et peuvent fausser le calcul préétabli et le gain estimé en amont de l’implémentation. Il a été démontré par des études que lorsque le réel est en décalage par rapport à ce qui a été communiqué, cela crée un écart qu’on appelle « The Promise/Performance gap » (Van de ven, 2008) et c’est exactement ce qui a été relevé à travers l’identification de ces coûts cachés.

En plus des coûts cachés identifiés qui pourraient aider à réaliser de meilleures estimations, les principaux points à retenir pour les acteurs de l'immobilier sont :

  • Une étude approfondie des besoins des collaborateurs, indispensable avant tout projet d’aménagement en flex-office. Si le besoin se fait sentir, si le métier le permet, si la technologie suit et s'il y a un bon accompagnement avant et après la mise en œuvre, le flex-office bien pensé pourrait convenir à des cas particuliers.
  • Un regroupement des collaborateurs par mission ou par département pour faciliter le lien entre les équipes, afin d’éviter les coûts cachés relatifs au manque de communication et de perte de lien social.
  • L'intégration d'ergonomes peut jouer un rôle significatif dans la convergence des exigences professionnelles, des ressources professionnelles et du bien-être du travailleur (De Croon et al., 2005).


Pour en savoir plus, lien vers l’article académique : 
Nappi, I. et Eddial, H. (2021), "Real cost of flex-offices: discourse and reality", Journal of Corporate Real Estate.
https://www.emerald.com/insight/content/doi/10.1108/JCRE-02-2020-0006/full/html?skipTracking=true

Date de parution : Juin 2021

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