Réinventer l'immobilier de bureaux

Décembre 2021

Alors que le télétravail se généralise, donner du sens à la vie de bureau est devenu une priorité. « Les espaces de travail doivent exprimer l'identité de l'entreprise, renforcer le lien d'appartenance des salariés et amplifier les fonctions de socialisation », résume Frédéric Miquel, directeur général de Kardham. Adapté aux nouvelles contraintes du flex office, le bureau s'ouvre à une plus grande mixité d'usages et de locataires. Moins centralisé, il revêt des formes hybrides , nomades ou satellisées, et replace les hommes au centre des organisations.

Article publié dans Les Echos par Eugénie Deloire.

Flexibles et conviviaux

Avec une moyenne établie à 2 jours de télétravail par semaine et un ratio abaissé à 0,67 poste de travail par personne au lieu de 1, le bureau se met à l'heure du flex office. Moins de postes individuels mais plus d'espaces collaboratifs et des zones de convivialité pour faire vivre le collectif : une organisation qui requiert souplesse et agilité. Dans le futur siège de Safran, à Malakoff, les plateaux ont été conçus pour rendre l'évolutivité des espaces intérieurs possible, avec des équipements techniques adaptés pour toutes les configurations et un minimum d'encombrement.

« L'immeuble a été calibré pour recevoir un maximum d'effectifs mais les espaces peuvent être modulés en fonction des besoins », explique Sébastien Matty, PDG de GA Smart Building. Le travail à distance accroît le besoin de fédérer les équipes. Pour le siège de l'industriel Delachaux à Colombes, l'aménageur BMA Group a créé une « place du village », lieu d'accueil, de restauration et d'échanges informels.
« Meeting is the new office », assure Victor Carreau, cofondateur de Comet Meetings, pour qui le bureau rime avec sociabilité.

La « place du village » du nouveau siège social de l'industriel Delachaux, aménagé par BMA Group. Alexis Paoli
La « place du village » du nouveau siège social de l'industriel Delachaux, aménagé par BMA Group. ©Alexis Paoli

Mixtes et ouverts

Oubliées les forteresses imprenables, la nouvelle génération de tours de bureaux s'ouvre à la ville et à ses habitants. « C'est un véritable travail de couture et d'artisan qu'opèrent les promoteurs, aujourd'hui, pour participer à la création d'une ville du quart d'heure reposant sur une mixité des usages et des classes sociales », explique Arnaud Guennoc, directeur du développement d'AG Real Estate France. 

Dans le quartier Bruneseau, en pleine transformation urbaine, les tours Duo, de 180 et 125 mètres de hauteur, imaginées par Jean Nouvel, réunissent à la fois des bureaux - le futur siège de la BPCE et sa filiale Natixis -, des commerces, deux restaurants d'entreprise, un auditorium, un hôtel de 139 chambres et un bar-restaurant
panoramique.

A Clichy, l'immeuble Black réalisé par AXA Im Alts et Redman pousse aussi loin le curseur de la mixité. Ce bâtiment de 50 000 m², scindé en deux bâtiments indépendants et ouvert sur le Parc des Impressionnistes, dispose d'un toit-terrasse équipé d'une piste d'athlétisme de 400 mètres et d'un terrain de volley accessibles aux habitants du quartier.

Quartier Bruneseau
Le quartier Bruneseau, à la frontière entre Paris et Ivry, fait l'objet d'une vaste opération de renouvellement urbain pour devenir un quartier mixte composé de logements, commerces, bureaux et services. ©Bruneseau

Immeuble Black
A Clichy, l'immeuble Black totalisera près de 50 000 m² d'espaces de travail flexibles et pourra ainsi accueillir jusqu'à 4 100 collaborateurs pour une multiplicité de modes collaboratifs avec près de 10 000 m² d'espaces extérieurs, jardins, balcons et terrasses. ©L'Autre image

Nomades et partagés

Malmené pendant la pandémie, le marché du coworking a retrouvé de sa superbe. « Nous avons battu notre record de réservations depuis septembre », se réjouit Baptiste Broughton, cofondateur de Neo-nomade, plateforme de réservation d'espaces de travail. Il constate qu'« un grand nombre d'entreprises souhaitent réduire leur empreinte immobilière et réinvestir cette économie dans des solutions flexibles », quand d'autres optent pour la sous-location des surfaces devenues vacantes. La satellisation des lieux de travail rapproche le bureau des salariés et facilite le nomadisme.
« Des entreprises abonnent l'ensemble de leurs effectifs à notre réseau national. Cela leur permet d'accéder à un espace de travail à moins de 10 kilomètres de l'endroit où ils se trouvent », indique Christophe Burckart, directeur général d'IWG (Regus et Spaces). Le groupe, qui possède 130 sites en France, a densifié son maillage territorial en rachetant, en 2020, le réseau Stop & Work : des centres de télétravail situés en zones périurbaines, comme alternatives au travail à la maison. 

Spaces
Spaces est une marque du spécialiste des espaces de travail flexibles, IWG. Le groupe, qui possède 130 sites et France et 3.500 à l'international, a densifié en 2020 son maillage territorial grâce au rachat du réseau Stop & Work. ©Iwg

Tiers-lieux et espaces hybrides

L' hybridation des actifs immobiliers a fait naître de nouveaux concepts tels que le « workation » ou la
« workspitality » où le bureau s'imprègne des codes du tourisme de loisirs et de l'hôtellerie, et vice versa. Lancée avant la crise, l'offre de bureaux partagés ou privatifs développée par le groupe Accord s'est renforcée en 2021 avec l'inauguration du « Wojo Corner-L'Appart », dans l'hôtel Pullman-Eiffel à Paris.
« Nous transformons en bureaux équipés et connectés les espaces insuffisamment optimisés dans les hôtels tout en maintenant une offre de services hôteliers : ouverture 24/24h, restauration, salles de sport, accueil soigné, etc. », explique Stéphane Bensimon, CEO de Wojo. CitizenM, Mama Works ou Deskopolitan offrent également des chambres à louer dans les centres urbains.
Mais les tiers-lieux se déclinent également sur les territoires. Selon France Tiers-Lieux, leur nombre devrait passer de 1 800 en 2018 à 3 500 en 2022. A Melun, l'ancienne gare va ainsi être transformée en hôtel « multi-usages » qui comprendra 4.700 m² de bureaux transformables, un hôtel, une maison médicale, un restaurant et des espaces de services. Ce projet de 12 000 m² au total, baptisé « Prélude », verra le jour en 2025.

Accor
Le groupe Accor a lancé le nouveau concept « Wojo Corner-L'Apport » dans l'hôtel Pullman-Eiffel (Paris 15e) : 186 m² de bureaux partagés surplombant Paris. ©Wojo

Aménagement : un projet nommé désir

Accompagnant les entreprises dans l'optimisation de leurs surfaces immobilières, les aménageurs rivalisent d'imagination pour rendre le bureau plus attractif. Ils s'appellent Moore, Sowen, Quadrilatère ou CDB.
Leur ambition commune : transformer l'entreprise en lieu de vie, associant le bien-être à la performance, pour donner l'envie aux salariés de se rendre au bureau. « Nous appliquons aux espaces de travail notre expertise en design et une méthodologie proche de celle utilisée dans d'hôtellerie », explique Pierre-Alexandre Pillet, cofondateur de Sowen. La société s'est vu confier l'aménagement de la société Mediaperformances dans la tour Alto, à La Défense. Le projet, présenté comme « écologique et qualitatif », prévoit l'utilisation de matériaux recyclés, un mobilier ergonomique offrant des positions de travail variées ainsi qu'une forte présence du végétal. Avec, pour mantra « Design is Hospitality », Moore Design a, de son côté, ouvert le Five à Paris, en septembre dernier : un bâtiment qui relève à la fois du siège social, du laboratoire d'innovations et de la vitrine des savoir-faire. Ne jurant que par « le fluide, le fonctionnel et le beau », l'aménageur revendique une approche sur-mesure pour concevoir des espaces reflétant l'ADN de chaque entreprise. De la même façon, Quadrilatère a mené trois ateliers avec Crédit Immobilier de France pour identifier les besoins des équipes en fonction de leur mode de travail. Le réaménagement des bureaux en open space, dans leur siège du 26, rue de Madrid à Paris 8 e, a ainsi donné lieu à la suppression de cloisons en parements métalliques au profit de « cloisonnettes » acoustiques et du PVC pour une moquette absorbante. Enfin, pour accompagner la start-up Lunii, qui envisage de doubler son effectif d'ici à la fin 2022, CDB a aménagé des espaces de travail inspirés de l'univers ludique et imaginaire de l'entreprise. Autant d'opérations séduction qui rendent le bureau désirable…

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Nathalie Neyret

Nathalie Neyret

Directeur Marketing & Communication

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