Flex office : l’espace comme levier de transformation managériale

Juillet 2021

Dans un précédent article, le docteur en sciences humaines et sociales, spécialiste de la flexibilité Nicolas Cochard, revenait sur les résultats de l’enquête menée par la Chaire Workplace Management de l’ESSEC. Il présentait alors le flex-office comme une équation économique qui, si elle était bien posée, pouvait répondre autant aux besoins de l’employeur qu’aux attentes des employés. Pour autant, le flex-office représente bel et bien un chamboulement au sein des entreprises, notamment pour le mid-management. Entretien.

L’espace de travail : un lieu politique

Pour Nicolas Cochard, ce sont les managers intermédiaires qui souffrent le plus du passage au flex-office. « Cela les impacte davantage parce qu’un espace d’entreprise est un espace politique. » déclare-t-il. De fait, le mode d’aménagement traditionnel voulait que la taille du bureau soit proportionnelle à la position hiérarchique de son occupant. De même, le bureau fermé du manager, à la porte duquel les employés n’osaient pas frapper, renvoyait un message très fort d’autorité.

Or, avec les organisations de travail ouvertes, le manager se voit dépossédé de ces attributs du pouvoir. « Toute la symbolique de l’espace politique s’effondre. Les managers d’aujourd’hui doivent diriger autrement : par la légitimité et la compétence. C’est d’ailleurs plutôt sain de se baser sur un management de terrain, plutôt que sur les attributs symboliques du pouvoir. » expose Nicolas Cochard. Pour autant, le flex-office n’efface pas complètement les hiérarchies. La verticalité des organisations persiste bel et bien, mais sous une autre forme. « La contrepartie des aménagements ouverts, c’est l’effet panoptique, dû au fait que le N+1 travaille tout à côté de ses collaborateurs. » précise l’expert.

Flex-office : vers une révolution du management

Selon le docteur en sciences humaines et sociales, nous assistons donc à une révolution du management. Depuis le Taylorisme, le chef d’atelier, le manager, a une place bien précise dans l’entreprise. Or, le flex-office déplace le manager au milieu de ses troupes, ce qui l’oblige à trouver un équilibre qu’il n’avait pas à chercher avant. « C’est super pour les équipes qui disposent alors du soutien de leur chef à proximité. Mais pour lui, cela représente un effort. Il doit rester proche de ses collaborateurs sans pour autant devenir leur « pote ». » ajoute Nicolas Cochard.

En plus de cette difficulté à trouver sa place, le manager fait parfois face à une surcharge cognitive. En effet, la porte du bureau fermée faisait jusque-là office de filtre physique. Il fallait une bonne raison pour venir frapper à la porte du manager. Au milieu d’un open space ce filtre n’existe plus et le manager se voit sur-sollicité par ses équipes. Il n’a alors plus de temps pour ses propres tâches individuelles. Cette réalité interroge donc sur un enjeu organisationnel. Combien de personnes un manager peut-il convenablement diriger ? « Voilà une question à laquelle les organisations devront répondre. Si elles souhaitent passer à des formes spatiales ouvertes et à un management de proximité, cela doit se faire sur de plus petites cellules managériales. » estime Nicolas Cochard.

L’espace comme levier de transformation managériale

Le flex-office est avant tout un sujet de management. L’espace est d’ailleurs souvent un point d’entrée vers une transformation plus globale des entreprises. Selon Nicolas Cochard : « dès que l’on touche à l’espace, au plan, on touche à l’humain. »
Aussi, une entreprise qui porte un projet de flex-office doit également repenser sa culture managériale. « Le succès d’un projet de flex-office dépend des individus, des métiers, de la culture. Si le flex n’est pas contextualisé, c’est sûr que ce sera l’horreur. Un dirigeant qui voudrait instaurer un copier/coller de flex parce qu’il a vu trois photos des locaux de Google est sûr d’allumer le feu dans son entreprise. » alerte-t-il.

Pour Nicolas Cochard, il est certain que le flex-office va se développer dans les prochains mois, notamment sous l’impulsion du télétravail et des enjeux économiques qu’il représente. « Les salariés ne pourront pas tout avoir : le télétravail et le bureau fixe. C’est une équation économique qu’il faut poser. Mais le principal enjeu, c’est l’accompagnement humain. » conclut-il.

Interview par Sibylle Pinochet, pour widoobiz.

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